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— Attends, je vais t’aider, je propose en prenant les verres qu’il tient dans la main pour les poser sur la table de la cuisine.

Eleanore est assise dans une chaise haute pour être à hauteur de table. Elle gribouille sur une feuille blanche avec des pastels pendant que nous préparons rapidement le repas. Il est passé treize heures, il est plus que temps de lui donner à manger.

Les plats qu’Alexander a commandés chez le traiteur sont ouverts sur le plan de travail. Voilà ce que contenait les sacs qu’il tenait à notre arrivée. Je n’ose fouiller dans les armoires alors, je le suis comme son ombre et lui prends le nécessaire de table des mains : les assiettes, les verres, les couverts.

 

 

Pendant le repas, Alexander et Eleanore discutent joyeusement. L’acteur lui pose beaucoup de questions. Cela se sent qu’il veut connaître sa fille.

— Elle parle très bien pour une enfant de son âge, remarque-t-il en me souriant.

J’acquiesce avec fierté. Je n’ai jamais été une partisane du parler bébé. J’ai toujours essayé d’utiliser un vocabulaire adapté aux différentes étapes de son développement.

Je profite de la conversation du père et de la fille qui sont assis face à moi pour les observer avec attention. Eleanore ressemble beaucoup à Alexander. La même couleur des yeux, les mêmes mimiques et la même ride du souci au-dessous des yeux.

Je souris en regardant Eleanore manger avec appétit sa part de lasagne. C’est son plat préféré. Il en est de même pour ses vêtements et ses cheveux. Sa bouche est toute rouge et plusieurs mèches de ses cheveux clairs sont aux couleurs de la sauce.

Assise dans la chaise haute, elle me dépasse d’une bonne tête. Il faut dire qu’elle est déjà grande pour son âge. Comme son père d’ailleurs.

 

Je pousse du bout de la fourchette, un morceau de salade. Je sais que ce n’est pas bien de jouer avec la nourriture, mais je n’arrive pas à manger quand il est dans les parages.

En tournant la tête, je surprends Alexander qui me regarde avant de me sourire. Je n’arrive pas à déchiffrer son regard. C’est un réel avantage pour lui d’être acteur. Pas pour moi !

Mes joues se colorent. Je baisse les yeux sur mon assiette et me concentre sur son contenu pour cacher mon trouble.

Je ne comprends pas pourquoi mon corps réagit comme cela en sa présence. Pourtant, ce n’est pas mon genre. En général, c’est ma tête qui dirige et pas mon cœur !

Mais là, il suffit qu’il me touche pour que mon corps s’enflamme. Comme s’il réveillait des envies primaires enfouies.

 

— Aleande, belle ma maman, dit Eleanore en souriant.

J’écarquille les yeux et manque de m’étouffer avec le morceau de viande que je mâche. Pour me donner contenance, j’attrape d’une main tremblante le verre d’eau posé devant mon assiette et bois une longue gorgée d’eau.

— Ta maman est vraiment très belle, répond-il.

Je sens son regard se poser sur moi et détailler mon visage. Mes joues sont en feu. J’ai chaud. J’ai aussi très envie de sortir de la pièce pour ne plus m’y trouver en même temps que lui. Sans lui accorder un regard, je pose le verre et me lève de table pour préparer du thé.

 

Eleanore est vraiment heureuse que nous soyons ici tous ensemble. Est-elle consciente de la signification du mot « papa », elle qui n’a toujours connu que sa maman ?

Elle a tellement d’amour à donner à son acteur de père et cela se voit qu’Alexander ne demande que cela. Ses yeux brillent lorsqu’il la regarde. Il s’émerveille lorsqu’elle fait quelque chose même de routinier.

Au fond de moi, malgré ma mauvaise foi évidente, je sais qu’il est le père idéal pour elle.

Cela ne m’empêche pas d’être inquiète à cause de son métier. Je me demande ce que sera sa vie lorsque les journalistes et les fans découvriront qu’Alexander Wills a un enfant. Sera-t-elle privée de son enfance ? Son adolescence se passera sous l’œil aiguisé des paparazzis qui relateront sur internet et dans la presse les bêtises qu’elle pourrait commettre comme tous les adolescents de son âge ? Est-ce qu’elle pourra profiter de sa vie ? Ses sorties avec son père ne seront plus des moments intimes !

Je me mords la lèvre du bas pendant que je sors les parts de tarte aux pommes du carton. Il y a tellement d’exemples qui me viennent en tête.

Après le dessert, Eleanore entraîne son père dans le salon pendant que je commence à débarrasser la table pour faire la vaisselle.

 

Perdue dans mes pensées, je me rends compte que je frotte le même verre depuis cinq minutes lorsque Alexander s’arrête à mes côtés.

— Salut, murmure-t-il doucement.

Il prend la serviette que j’ai posée à côté de l’évier et essuie la vaisselle propre.

— Je peux le faire seule, je proteste en continuant de frotter nerveusement l’assiette que je tiens à la main.

Je fixe l’eau de vaisselle.

— Je sais, murmure-t-il en me regardant. Eleanore joue dans sa chambre. Laisse-moi t’aider Léa !

Je hausse les épaules. Qu’il fasse ce qu’il veut !

 

— Mes parents nous invitent à dîner mercredi soir, lâche-t-il, en brisant le silence.

Mon cœur accélère rapidement. Surprise, je brise l’assiette que je tiens dans la main. Je lève les yeux vers lui sans faire attention aux morceaux de porcelaine qui me rentrent dans la paume pendant que je me tiens fermement au plan de travail pour ne pas tomber. Je ne quitte pas Alexander des yeux. C’est une très mauvaise idée de rencontrer sa famille surtout qu’ils doivent être au courant de toute notre histoire. Je suis lâche mais je n’ai pas envie de devoir expliquer pourquoi Alexander a été privé de sa fille tout ce temps.

Je sens le peu de couleurs que j’ai encore sur le visage disparaître. En pilote automatique, je me tourne et ramasse les morceaux de l’assiette.

— Aïe !

L’éclat qui m’a légèrement ouvert la main est toujours contre ma peau et me fait mal.

J’observe la plaie sans vraiment la voir et regarde le sang couler. Que suis-je censée faire ?

 

Je sursaute lorsque je sens ses deux mains se poser doucement sur mes avant-bras. Il me guide vers l’évier où il place ma main blessée sous le jet d’eau. Je n’ai pas la force de lutter alors je le laisse faire.

— Tu es toute pâle, observe-t-il en inspectant mon visage avec attention. Ce n’est pas étonnant, tu n’as presque rien mangé pendant le repas !

Il tient toujours ma main sous l’eau. Son autre main est posée sur ma taille pour me soutenir. Il doit penser que je suis en train de faire une hypoglycémie.

J’acquiesce distraitement en me concentrant sur la plaie. Elle est fine et peu profonde, cela me soulage.

 

— Tu n’auras pas besoin de suture.

Avec douceur, il me guide vers la table. Sa main est toujours posée sur ma hanche. Je tente d’y faire abstraction. Je mentirais en disant que ce contact ne me perturbe pas. Lorsqu’il m’aide à m’asseoir comme si j’étais une vieille dame, je ne râle même pas.

— Ne bouge pas ta main, murmure-t-il doucement en déposant délicatement celle-ci sur la table.

Docile, j’acquiesce. Il prend au-dessus du frigo une trousse de premiers secours et revient rapidement vers moi.

Il attrape une chaise et s’assied face à moi. Nos genoux se touchent. Avec des gestes précis, il désinfecte la plaie et la recouvre d’un pansement propre.

Je ne le quitte pas des yeux. Son visage est concentré.

— Voilà, la malade est soignée, dit-il, en levant les yeux vers moi.

Sa main tient toujours la mienne. Il me sourit.

— Merci Alexander, je murmure en lui souriant à mon tour.

 

— Tu vas bien ? demande-t-il en me regardant avec insistance pendant que son index caresse la paume de ma main.

— Oui, je réponds en faisant abstraction des frissons qui me parcourent le corps. Il faut que je ramasse les morceaux de porcelaine.

J’enlève doucement ma main et me lève.

— Hors de question ! Tu vas aller te reposer. Tu es vraiment toute pâle, dit-il en me guidant vers le salon.

 

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