— Voilà madame bébé, thé.
Assise sur le canapé du salon, je regarde Eleanore jouer avec ses poupées. Mon père vient de me la déposer. Pressé, il n’a malheureusement pas pu rester. Une exposition temporaire d’un artiste inconnu à découvrir avec Jack.
Eleanore dépose une coupelle en plastique devant Rose, sa poupée préférée.
— Cookies, murmure-t-elle en se frottant le ventre avant de mordre dans un biscuit qu’elle vient de prendre dans l’assiette que j’ai déposée sur la table basse.
C’est l’heure du goûter.
Je souris en buvant une longue gorgée de thé vert. Elle est vraiment adorable.
Mon téléphone est posé à côté de moi. Je lui jette de temps en temps des regards insistants. J’attends avec impatience d’avoir des nouvelles d’Alexander. Je ne sais pas quand son avion doit atterrir à Vancouver. Alors, je patiente...difficilement.
A mon tour, je mords dans un sablé lorsque quelqu’un s’énerve sur la sonnette qui résonne dans toute la maison. Cela devient une habitude.
Eleanore arrête de jouer, se tourne vers moi et fait une grimace à laquelle je réponds en haussant les épaules.
— Qui ?
— Je ne sais pas. Continue de jouer, maman revient.
Je me lève du canapé en terminant mon biscuit, et me dépêche de rejoindre l’entrée pour sauver ma sonnette qui passe un sale quart d’heure.
— Je hais la neige !
— Des bottes auraient été plus pratiques que tes escarpins.
— Il n’y a que mes Versace qui vont avec cette robe.
— Et ils ne font pas de bottes chez Versace ?
Je pouffe de rire. Pas besoin d’ouvrir la porte, je connais déjà l’identité des personnes qui sont de l’autre côté. Peggy, Jill et Karen.
— Tu en as mis du temps, râle Jill quand j’ouvre la porte en souriant.
Mon sourire s’agrandit quand Peggy lui donne un coup de hanche en lui faisant les gros yeux. Ces deux-là sont comme chien et chat, et pourtant, elles s’adorent.
Je perds le sourire quand mon regard glisse vers les plats qu’elles tiennent dans leurs mains gantées. Je fronce les sourcils. Je suis pourtant certaine que nous ne devions pas nous retrouver ici avant la semaine prochaine.
J’ai dû oublier. Heureusement que j’ai toujours des réserves dans les placards pour improviser un repas. Un avantage d’être aussi gourmande que je le suis.
— Surprise ! crient les enfants en chœur.
Eleanore – sans doute attiré par les cris – se stoppe à mes côtés, et tape dans ses mains en reconnaissant ses copains de jeux.
— Ouiiiii !
— Potins et bouffe, lance joyeusement Peggy en levant légèrement les plats qu’elle tient. Par contre, ce n’est pas qu’on a froid, mais les Versace de Jill ne supportent pas la neige, ajoute-t-elle en riant pendant que Jill lève les yeux au ciel.
— N’importe quoi !
— Pardon, entrez !
Je me pousse pour les laisser passer. Les enfants sont les premiers à se faufiler à l’intérieur. Ils courent directement derrière Eleanore qui les guide vers la salle de jeux du rez-de-chaussée.
— VOS CHAUSSURES ! hurle Peggy.
Karen et moi échangeons un regard complice. Elle est la dernière à entrer. Sa petite Jenny dort dans l’écharpe de portage. Lorsqu’elle passe à mes côtés, Karen dépose un baiser sur ma joue.
— Désolée d’envahir ta maison, murmure-t-elle juste pour moi.
— Ne t’excuse pas, j’en ai besoin, je chuchote.
Elle acquiesce et s’avance dans la maison pour rejoindre les autres.
Je m’apprête à fermer la porte d’entrée quand de joyeux cris attirent mon attention. Décidément, tout le monde s’est passé le mot pour me rendre visite. Ravie, mais surprise tout de même. Les cousins d’Eleanore montent les marches avec conviction. Je reconnais le pas conquérant des hommes Wills. Derrière les jumeaux, Julia et Lizzie me sourient en marchant plus doucement. Leurs mains sont encombrées par des plats qu’elles tiennent précautionneusement. Pourquoi en les regardant, ai-je l’impression d’avoir oublié une information importante ?
A ma hauteur, Ian et Connor me font un câlin et attendent sagement l’autorisation de Julia pour rejoindre Eleanore qui est revenue dans le couloir pendant que ses copains enlèvent vestes, pulls et bottes de neige.
Une fois tout le monde à l’intérieur, je ferme la porte. Le couloir est assez étroit et encore plus quand il y a autant de monde qui s’y trouve. Claustrophobe, passez votre chemin !
J’aide les enfants à se déshabiller. Une botte par-ci, une manche par-là.
— C’est toi qui as fait ça ? lui demande Lizzie.
Elles regardent les tableaux que nous aimons faire de temps en temps toutes les deux. Dans les bras de sa tante, Eleanore hoche fièrement la tête.
— Tata, ze peux ?
Eleanore veut rejoindre ses copains qui sont prêts à démonter ma maison...je veux dire à jouer.
En voyant les deux jeunes femmes regarder autour d’elles avec curiosité, je me souviens que c’est la première fois qu’elles viennent chez nous. Je dois penser à organiser un repas avec nos deux familles. Je suis certaine que Jack et papa seront heureux de rencontrer la famille d’Alexander. Après tout, nous n’en formons plus qu’une.
J’invite Julia et Lizzie à me suivre. En grandes habituées des lieux, les filles sont déjà assises dans la salle à manger. Et pour ne pas changer, Peggy et Jill se chamaillent pendant que Karen sourit sereinement.
— Va falloir réchauffer ceux-là, indique Jill en mettant à part les plats concernés.
Bien plus sociable que moi dans ce genre de situation, Julia et Lizzie se stoppent à mes côtés en souriant.
— Les filles, je vous présente Lizzie et Julia. Mes belles-sœurs.
Mon pouls s’accélère quand je prononce ces mots. C’est quelque chose d’étrange de dire ça à haute voix.
— Voici Karen, Jill et Peggy, j’ajoute en désignant chacune de mes amies.
— Salut.
— Bonjour.
— J’adore ta robe, lance joyeusement Julia à Jill en s’installant autour de la table.
— Je t’aime déjà, lui répond Jill en lui souriant.
Lizzie qui est la plus jeune, la rejoint. Bien vite, les conversations s’amorcent alors, je m’éloigne vers la cuisine.
Pendant que mes invitées discutent, je stoppe la desserte à côté de la table. Tout le monde participe à la conversation. Je peux donc me concentrer sur ma tâche.
— Léa n’est vraiment pas curieuse, se plaint Peggy quand je place un verre devant elle.
— Pas vraiment, je confirme en continuant mon tour de table.
— Tu ne veux pas savoir ce que nous faisons toutes là ? demande Jill en souriant malicieusement.
— J’ai dû oublier que vous veniez, je réponds en haussant les épaules.
Peggy soupire bruyamment. Jill se tape le front avec le plat de la main pendant que les autres rient.
— Tu as la meilleure mémoire du groupe, réplique Peggy.
— Léa ! sois un peu curieuse pour une fois, gémit Jill.
Je connais suffisamment Jill et Peggy pour savoir qu’elles ne laisseront pas tomber cette conversation tant qu’elles n’auront pas gagné.
— Que faîtes-vous là ?
Je suis faible, je capitule trop facilement. D’un autre côté, ma curiosité est plus qu’éveillée.
— Alexander, dit Lizzie en me souriant.
Je fronce les sourcils. Je ne comprends pas.
Karen qui est toujours la première à venir à mon secours quand Jill et Peggy s’amusent avec moi, m’explique doucement :
— Alexander a téléphoné ce matin à Peggy pour lui demander que nous venions te tenir compagnie. Et je crois, qu’il a fait de même avec Julia et Lizzie. Il ne voulait pas que tu restes seule après son départ avec ce qui s’est passé hier.
Alexander
J’ai mal aux joues à force de sourire comme une idiote.
— Je reviens tout de suite.
Je m’éloigne à grands pas. J’ai besoin de mon téléphone tout de suite.
D’ailleurs, quand on parle du loup, j’ai deux messages de lui. Mon sourire s’agrandit en les lisant et mon cœur se réchauffe.
Alexander : Je viens d’arriver à Vancouver. Je meurs d’envie de prendre l’avion pour rentrer et te retrouver. C’est grave docteur ? Je t’embrasse mon amour. Ps : je dois éviter de penser à tes lèvres sur les miennes.
Tu as sans doute de la visite à l’heure qu’il est. Passe une bonne journée mon adorable femme.
Moi : Merci d’être toi !
Dépitée, je fixe le message que je viens d’envoyer. Décidément, je ne suis pas du tout douée pour faire de belles phrases romantiques dans la vraie vie. C’est désespérant.
— Bella ! Ton Edward revient bientôt, alors viens te joindre à nous. On a des tas de questions à te poser.
Bella ? Edward ? Jill n’a quand même pas osé.
— Twilight ? Vraiment ? Tu n’avais pas une autre référence plus romantique que cette histoire, râle Peggy.
— Cette histoire est extrêmement romantique, réplique Jill.
— Pour des ados, se marre Peggy pendant que je les rejoins.
Mon téléphone en main, je ne fais pas attention au débat qui a lieu. Karen est d’accord avec Peggy. Pour elle, Twilight ne devrait pas être la référence du romantisme. Julia rejoint Jill. Elle a adoré les romans, elle a adoré les films et est fan de Robert Pattinson.
— 50 nuances de Grey est quand même mieux, dit Lizzie avec conviction pendant que Julia, Jill hoche la tête avec entrain. Jamie Dornan est vachement hot !
Peggy s’étrangle avec son cocktail sans alcool. Sujet sensible. Peggy est avocate des droits des femmes. Elle lutte avec acharnement contre le sexisme encore trop présent dans notre société. Pour elle, cette histoire est le diable. D’ailleurs avec Karen, nous avons cru à la fin de notre amitié à quatre quand Jill et elle se sont violemment disputée à ce sujet.
— On mange ? je lance assez fort pour couvrir les bruits de conversation.
— Bonne idée, réponds Karen aussi fort en faisant les gros yeux à Jill et Peggy qui se disputent sur le sujet.