La chaleur dans la petite chambre avait fait apparaître de la buée sur les carreaux de la fenêtre. Josefina n’avait pas pensé à bien tirer le rideau, si bien qu’elle ressentait tout de même le petit courant d’air frais caressant son pied gauche qui dépassait de la couette. Elle ne tint qu’une petite minute avant de se blottir de nouveau sous les draps dans un soupir de bien être, trop heureuse de retrouver la chaleur bienvenue du lit.
Le souffle chaud de Gabriela lui chatouilla le cou et lui arracha un rire. Ses bras s’ouvrirent et sa petite amie vint se serrer contre elle. Son corps était brûlant et si doux. Elle adorait pouvoir y promener ses mains, ses doigts, sa bouche. Sentir son odeur sucrée lui procurait toujours un sentiment d’extase qui lui faisait réaliser qu’elle était réellement heureuse. Elle n’avait finalement pas besoin d’autre chose.
- Tu ne devrais pas y aller ? questionna Gabriela avec son léger accent du sud.
- Si, mais je pense que je vais déposer ma démission…
- Ne dis pas de bêtise !
Gabriela lâcha un éclat de rire, soufflant contre son cou et lui procurant une sensation de chatouille qui l’obligea à baisser le menton. Leurs fronts s’entrechoquèrent doucement et les deux jeunes femmes se remirent à rire.
- Très sérieusement, il m’est de plus en plus difficile de te quitter… Pourquoi est-ce que j’ai accepté ce stupide travail qui mobilise la plupart de mes soirées que je pourrais passer avec toi…
Josefina déposa un baiser dans le cou de Gabriela qui sourit dans ses cheveux.
- T’imagine ce que nous allons endurer la semaine prochaine…
Josefina ne répondit pas et se serra un peu plus contre le corps de sa petite amie. Elle n’aimait pas penser à cela. Partir une semaine loin de Madrid n’était pas pour lui déplaire sur le principe. Mais cela voulait dire quitter Gabriela et aller faire face à sa famille. Une semaine, sept jours. Une éternité ! Mais elle avait beau réfléchit au moyen de se désengager de cette contrainte annuelle, elle n’avait trouvé aucune bonne raison à servir à sa mère.
Gabriela s’était mise à caresser son dos. Des petits cercles de toutes tailles qui lui donnaient des agréables frissons mais qui ne parvenaient pas à lui retirer de la tête ses soucis. Maintenant qu’elle s’était remise à penser aux fêtes de Noël qui approchaient, sa bulle de bonheur avait éclaté et elle refaisait face à la dure réalité de sa vie.
- Tu sais…, commença Gabriela dans un murmure. Juste avant que tu ne rentres, j’ai reçu une lettre de ma mère.
Josefina se décolla légèrement d’elle pour pouvoir croiser le regard vert et envoutant de la femme de sa vie. Ses joues légèrement rosées lui donnaient un teint magnifique. Ses lèvres pleines ne demandaient qu’à être embrassées. Mais Josefina se retint et lui donna toute son attention. Elle savait combien les relations entre Gabriela et sa mère étaient compliquées. Contrairement à elle, sa petite amie n’avait plus que son ainée dans sa vie. Les fêtes de fin d’année n’avaient donc pas la même signification dans leurs deux familles.
- Que te disait-elle ?
- Rien de spécial, comme d’habitude.
Le regard émeraude se fit fuyant. Josefina sentit l’appréhension tendre son corps et voulut la serrer contre elle. Mais Gabriela avait besoin de lui dire quelque chose et Josefina savait que ça ne l’aiderait pas.
- Elle m’a répondu pour le 25 prochain, continua doucement Gabriela en s’allongeant sur le dos, les yeux braqués au plafond. Elle n’est apparemment… pas disponible.
Son ton se fit plus dur et Josefina sentit son cœur se serrer. Cette année avait été longue et si particulière pour Gabriela. Après plusieurs mois sans nouvelles de sa mère, celle-ci s’était manifestée à peine quatre semaines auparavant et avait tenu de beaux discours pour renouer des liens avec sa fille. Une envie de rattraper le temps perdu. Ses souhaits n’avaient cependant pas tenu jusqu’à Noël.
- Elle t’a dit pourquoi ? demanda Josefina.
- Non.
Les bruits de la rue se firent entendre dans le silence du petit studio. Josefina se crispa puis soupira.
- Enfin je suppose qu’elle sera déjà en très bonne compagnie.
- Je suis désolée …
Josefina s’en voulut soudainement de se plaindre si souvent de sa vie familiale. Elle réalisait qu’elle avait la chance de pouvoir tout de même toujours compter sur les siens. Mais que pouvait-elle faire à présent pour aider Gabriela ? Celle-ci se retrouvait soudain seule pendant les fêtes de Noël. Un moment qui se voulait convivial et chaleureux.
- Je m’en fous. Oui, en fait je m’en fous complètement !
Gabriela se retourna pour lui faire face et se redressa sur un coude. Ses yeux verts étaient chargés d’un déterminisme nouveau. Habituellement, Josefina aimait la voir dans ce mouvement optimiste. Ce soir-là, elle avait un drôle de présentiment.
- Je n’ai pas besoin d’elle, je n’ai jamais eu besoin d’elle.
Répéter ses idées semblait leur donner plus de force.
- Alors je ne compterai plus jamais sur sa présence pour quoi que ce soit. Et je ne lui donnerai plus jamais rien.
- C’est quand même ta mère…, tenta de temporiser Josefina.
- Une mère qui en est une que lorsque ça l’arrange ! s’emporta Gabriela en se redressant.
La couverture glissa, dévoilant son corps nu qui se couvrait doucement de chair de poule. Elle jeta ses jambes hors du lit et se leva sans aucune gêne. Josefina avait l’impression qu’elle allait sortir en trombe de son studio pour aller crier aux oreilles du monde cette nouvelle promesse qui se gravait dans son cœur.
- Ce n’est pas comme ça que ça marche ! Quand tu fais un enfant, tu en assumes les responsabilités. Elle ne l’a jamais fait ! Ce qui montre bien qu’elle n’est pas réellement ma mère. Simplement ma génitrice en quelque sorte. Elle a décidé de ne rien me devoir, de faire passer tout le monde avant moi, alors je vais faire la même chose.
Josefina se glissa à son tour hors du lit et alla se coller contre le corps frais de sa petite amie. Ses bras entourèrent sa taille et elle la serra contre elle, essayant de lui insuffler toute l’énergie qu’elle avait. Elle n’aimait pas entendre ces mots, cette colère. Bien qu’elle puisse imaginer combien Gabriela devait en souffrir.
- Je me sens mieux !
Gabriela se retourna et la serra à son tour contre elle.
- Ne fais pas ce genre de promesse, lui murmura Josefina. Je ne veux pas que tu le regrettes par la suite.
- Ne me dis pas que c’est ton côté catholique qui ressort ! se moqua-t-elle en riant doucement.
Josefina sourit à son tour mais n’ajouta rien. Elle ne croyait pas vraiment en Dieu. Plus depuis qu’on lui avait si injustement enlevé son père. Mais elle avait quand même quelques principes qui restaient importants. Et les liens familiaux étaient de ceux-ci, surtout dans cette période.
- Est-ce que ton âme charitable pourrait venir en aide à mon âme perdue ?
Gabriela lui offrit son regard d’agneau, celui qui la faisait craquer presque à chaque fois.
- Quelle aide je pourrais t’apporter ?
Un nœud se forma dans le ventre de Josefina. Elle se sentait soudain prise au piège alors que face à elle, Gabriela hésitait tout en étudiant sa réaction.
- Je vais devoir passer les fêtes seule…
Josefina grimaça. Un Noël sans famille ou amis était un Noël triste et amer qui n’était souhaitable à personne, mais la jeune femme ne voyait pas quelle solution elle pouvait lui proposer.
- Est-ce qu’il te serait possible… de m’emmener avec toi ?
La moue de Gabriela se fit plus incertaine. Elle grimaça tout en scrutant avec attention son visage. Josefina aurait voulu se dérober, s’enfuir de son étreinte et réfléchir à cette question sans avoir l’impression d’être cernée de tout côté. Pourtant elle ne bougea pas. Ses yeux se voilèrent et elle imagina pendant un instant ce Noël en compagnie de Gabriela. Sa maison campagnarde. Sa famille. Son premier Noël sans son père. Sa fuite à la capitale et les reproches que sa mère allait lui faire. L’ambiance ne serait sans doute pas au rendez-vous. Mais si elle emmenait Gabriela avec elle, peut-être que cela permettrait de radoucir les maux de chacun ? De plus, ça leur éviterait de passer cette longue semaine loin l’une de l’autre ! Et de toute façon, que pouvait-elle dire pour le refuser à Gabriela ?
- Toi, venir à Felanitx !
Gabriela grimaça avant de voir apparaître le sourire sur le visage de Josefina. Aussitôt, son regard s’illumina.
- Alors tu veux bien ?
- Je ne te promets pas le meilleur Noël qui soit…, prévint la jeune femme.
- Ça sera sans doute le meilleur Noël que je n’aurais jamais fait ! contra Gabriela en ouvrant de grands yeux émerveillés. Mon Dieu mais Jo ! C’est le plus beau cadeau de Noël que tu puisses me faire !
- J’espère que mon vrai cadeau te plaira encore plus, grogna Josefina en faisant la moue. Il m’a couté quand même beaucoup plus cher que celui-ci.
- Rien ne peut être plus beau que de passer ces fêtes avec toi.
Gabriela l’entraina contre elle et l’embrassa à pleine bouche, glissant ses mains jusqu’à ses fesses. Josefina sourit contre les lèvres de sa petite amie et répondit à son étreinte. Si Gabriela était heureuse, alors elle le serait aussi. Et plus elle y réfléchissait, plus elle réalisait que c’était finalement la meilleure solution pour que les fêtes se passent au mieux.
- Je tiens quand même à t’offrir ton cadeau en amont. Ma famille ne sera sans doute pas ravie que tu vois ce que je t’ai acheté.
L’air coquin qu’elle afficha fit rire Gabriela qui la poussa jusqu’au lit.
- Je crois que tu vas faire envoyer un mot à ton patron. Tu as attrapé froid hier soir et tu es clouée au lit. Impossible pour toi de mettre le pied dehors.
- Gabi…
- Tu es à moi. Pour toute la nuit !
Gabriela se glissa à ses côtés et rabattit les couettes sur leurs têtes. La chaleur les enveloppa de nouveau et Josefina se laissa aller dans leur bulle secrète, remplie de bonheur pendant encore un temps.
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Note de fin de chapitre:
Voici le premier chapitre avec l'annonce des fêtes de Noël qui approchent pour Josefina qui se retrouve finalement à embarquer Gabriela avec elle !
Merci pour votre lecture et rendez-vous au prochain chapitre !
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