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Notes d'auteur :
Bonjour !
Maintenant venons-en au thème orchestre (sans commentaire).
Bonne lecture !
L’inspectrice et son collègue regardaient leur témoin d’une curiosité difficilement camouflée.
– Je joue dans cet orchestre depuis presque quinze ans, sourit-elle sous ses larmes qui avaient recommencé à couler. J’ai vu passer trois chefs d’orchestre. Autant pour dire que les petites Geneviève et Isabelle, je les connais depuis qu’elles sont venues à l’orchestre pour la première fois. Je m’en rappelle encore, c’était peu après que Bénédicte ait été nommé dirigeant de notre orchestre symphonique. Isabelle l’a accompagné dès le troisième jour pour écouter les répétitions et lui apporter des choses des trois coins de l’opéra. Puis, elle avait onze ans je crois, Geneviève a été prise comme violoniste. Elle était déjà si douée ! Evidemment, cela aurait été bien mieux pour elle de jouer dans un orchestre avec d’autres enfants mais elle ne voulait pas je crois. Je plains sincèrement Isabelle qui venait déjà plus longtemps mais qui ne devait que porter des partitions alors qu’elle jouait quasiment aussi bien. Elle a intégré l’orchestre que plus tard. Et personnellement, je la trouve encore plus douée que Geneviève mais ce n’est pas moi qui décide… Enfin, en tout cas j’ai toujours pensé qu’Isabelle était plus gentille et plus ouverte que Geneviève mais elle est aussi plus souvent de mauvaise humeur, si vous voyez ce que je veux dire. Alors que sa cousine est plutôt refermée. Elle est adorable mais elle ne parle qu’à ceux qu’elle connaît. Et là, ces derniers temps j’avais l’impression qu’elle avait pris exemple sur Isabelle. Elle a ramené un nouveau par exemple. Ce n’est pas du tout dans son genre d’habitude. D’habitude c’est plus sa cousine qui essaye de promouvoir l’orchestre. Si vous voulez mon avis, Isabelle est jalouse de Geneviève parce qu’elle a l’attention de son père. Oh, vous croyez que c’est elle qui l’a tuée ? Ce serait terrible ! Elles étaient comme des sœurs ! Non, ce n’est pas possible.

Laissant Marie Bienheureux nier cette hypothèse, Augustine se passa une main dans les cheveux en réfléchissant. Ainsi, le caractère de Geneviève avait changé. Oui, c’était ce qui l’avait aussi choquée en lui parlant. Que cela ne correspondait pas avec ce que disaient les témoignages. Elle était maintenant convaincue qu’elles avaient échangé, pour une raison ou une autre, leur rôle. La raison serait probablement très intéressante d’ailleurs. Et cela voulait dire qu’en réalité c’était Isabelle Mancheau qui était morte. Pourquoi ? Voilà, une question qui n’évoquait rien de bon. Soit parce que c’était Geneviève qui était visée avec tous les motifs possibles, soit quelqu’un visait Isabelle, était au courant de l’échange et il serait bien plus difficile d’enquêter là-dessus. Fallait-il maintenant confronter directement Geneviève avec cela ou fallait-il garder ça de côté pour la coincer le moment venu ? Pourquoi n’avait-elle rien dit ? C’était louche, non ? Ou avait-elle simplement paniqué ? C’était à voir et il était certain que Hugo serait de bon conseil.
En tout cas, ils avaient tiré le gros lot en venant voir ce témoin-ci en premier. Elle allait en profiter pour savoir davantage sur cet orchestre qui semblait tellement au centre de toutes les préoccupations des acteurs et figurants de ce meurtre.

« Cela paraît improbable alors. » tenta-t-elle de rassurer Madame Bienheureux. « L’orchestre semble être très important pour tous les membres de la famille, non ? »
– Enormément, se reprit la femme. Je ne sais même pas vraiment pourquoi parce qu’après tout Bénédicte n’est pas le fondateur et il n’a pas non plus uniquement dirigé celui-ci mais c’est compréhensible. Après tout, l’orchestre symphonique de la ville n’est pas un petit orchestre de rien du tout. Il est important pour tous ses membres. Mais il est vrai que Bénédicte s’engage énormément depuis le début. Forcément Isabelle et Geneviève aussi. Jusqu’ici la participation de cette dernière se restreignait surtout à briller lors des concerts en jouant merveilleusement bien. C’est ce qui a permis à l’orchestre de se démarquer des autres. Isabelle par contre ! Elle imprime des feuilles à distribuer, elle garde le contact avec tout le monde, elle essaye de trouver des créneaux qui arrangent, elle a même emmené un petit groupe dans les rues pour nous rendre plus connus. Je pense que sans elle, on ne serait rien. On peut jouer la plus magnifique des musiques, on peut voir les meilleurs solistes, sans publicité personne ne nous remarque. Alors je pense que derrière Geneviève et Bénédicte que le public voit en concert, il y a surtout le travail d’Isabelle.
L’inspectrice hocha doucement la tête, invitant son interlocutrice à poursuivre. Mais celui-ci se contenta de hausser les épaules.
– Vous savez, je ne sais pas quoi dire d’autre. Tout ça c’est si horrible et je ne sais pas du tout qui aurait pu faire ça ! Cette brave petite ne peut pas avoir tuer sa cousine. Ni quiconque d’autre !

Augustine n’en était pas si certaine. Après tout, Geneviève Croiset avait été assassinée. Au moins c’est ce que tout le monde croyait. C’était compliqué, elle allait devoir se faire un schéma pour être sûre d’envisager toutes les possibilités. Parce qu’Isabelle Mancheau avait de bonnes raisons d’assassiner Geneviève Croiset. Tout comme cette Sophie Verçon. Mais s’il s’agissait d’Isabelle Mancheau qui était morte et que le coupable était au courant cela n’avait pas de sens. Evidemment les motifs classiques pouvaient aussi prendre mais il fallait déjà savoir qui était au courant de l’échange. Et surtout se demander si Geneviève avait un motif pour tuer Isabelle. A première vue non mais elle savait que cela pouvait être trompeur. Il y avait toujours des secrets. D’ailleurs, pourquoi Geneviève aurait-elle accepté d’échanger de place avec Isabelle ? Qu’est-ce que celle-ci avait qu’elle aurait aimé avoir ?

Un léger toussotement de la part d’Hugo la tirait de ses pensées. Ah oui, elle devait poser une nouvelle question à Marie Bienheureux. Mais laquelle ? Elle voulait savoir quoi déjà ? Peut-être quelque chose sur la bombe ? Mais avait-elle encore été présente ? Non, ce n’était pas le cas, elle l’aurait lu dans le témoignage. Alors il fallait clore l’entretien et décider où aller ensuite. Elle replaça une mèche de cheveux derrière son oreille et se mit à chercher les bons mots. D’habitude, c’était toujours un de ses collègues qui se chargeaient de la fin parce que c’était tellement plus facile à l’oral, mais Hugo n’avait pas voulu l’aider avant alors ça l’étonnerait qu’il le fasse maintenant.
« Ce serait tout pour nous. Souhaitez-vous nous dire quelque chose d’autre ? »
– Non, je ne crois pas.
La femme se leva et avec l’échange des politesses usuelles, les deux policiers partirent de la librairie. Du moins ils firent vingt mètres avant qu’Hugo ne se retourne pour se précipiter vers le magasin.
– J’ai oublié quelque chose d’important ! Le nouveau tome de la série préférée d’Anna-Lena est sorti !
Augustine leva les yeux au ciel mais patienta sagement jusqu’à ce qu’il revienne avec un nouveau roman à l’eau de rose qu’il nierait avoir lu. En attendant, elle passa en revue les personnes à qui elle voulait rendre visite. Isabelle Mancheau ou Geneviève Croiset, selon qui elle était vraiment. Bénédicte Mancheau, le chef d’orchestre. Les deux meilleurs amis de Geneviève. Devait-elle du coup aussi trouver des informations sur Isabelle ? Ses amis, ses activités. Certainement, mais elle allait quand même partir du principe que c’était Geneviève qui était morte. Après tout c’était la version officielle et celle que tout le monde croyait. La deuxième soliste des premiers violons qui était venue alors qu’elle n’était pas à la répétition. Jean Bois, ce personnage qui semblait être une preuve vivante d’un possible échange entre les deux cousines. Par qui devait-elle commencer ? Et si elle laissa simplement la géographie décider ? C’était un critère plutôt pratique. Non, en réalité, elle avait envie de continuer la piste de la jalousie pour la place de première soliste. Elle l’avait menée ici et cela avait été fort concluant, alors elle voulait bien persister. Et cela la menait directement chez Sophie Verçon qui habitait à proximité de l’opéra. Elle en profiterait pour jeter un coup d’œil au bâtiment…

Elle exposa la situation en quelques mots à son collègue qui hocha la tête avant de proposer d’aller récupérer une voiture de police. Après tout, ils n’avaient pas envie de passer la journée à se promener d’un endroit à un autre. Augustine approuva et ce fut ainsi qu’elle se retrouva bien plus rapidement que prévu chez la famille Verçon. Elle sonna légèrement mal à l’aise. Elle n’aimait pas s’inviter chez les gens comme cela. Surtout quand ce n’était pas la bonne personne qui ouvrait.
– Bonjour, les interrogea le vieil homme qui les regardait avec méfiance comme s’ils venaient faire une perquisition chez lui. Que puis-je faire pour vous ?
Augustine lança un regard suppliant à son collègue. Il ne pouvait pas la laisser se débrouiller dans cette situation, non ? Il écarquilla un peu les yeux mais céda à sa demande muette. L’homme en face les dévisageait toujours encore, comme s’ils allaient le menacer dans quelques instants.
– Bonjour, monsieur, sourit-il alors. Nous cherchons une certaine Sophie Verçon. On nous a dit qu’elle habitait ici ?
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