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Journal de bord de Liz Hope du lundi 12 décembre 2112.
Est-ce que la date est un hasard ? Un coup du sort particulièrement réussi ? Ou tout était prévu à l’avance ? Quelque soit la bonne réponse, l’univers a un humour vraiment pourri.
J’ai toujours encore du mal à croire que nous ayons réussi à nous échapper de la foule d’humains mutés qui nous a présenté un si gentil comité d’accueil sur le parking. Je réitère mon avis d’après lequel on n’aura pas dû s’en mêler. Pourquoi essayer de délivrer une planète qui n’a pas la moindre envie de l’être ? On devrait s’occuper de nos propres affaires ça vaudrait beaucoup mieux. Vivre et laisser vivre, n’est-ce pas ?
En tout cas, on a réussi à accéder à l’immeuble désigné comme étant le quartier général à grand coup de lance-flammes (par Karen), d’éclairs (par Amaniel) et de croche-pieds (par Tizita). Non, je n’ai pas fait quoique ce soit. A ma plus grande honte, François a dû me porter à cause de mes jambes encore flageolantes après le vol. Ils auraient vraiment mieux fait de me laisser comme appât. Je ne sers vraiment à rien.
Le quartier général est bien équipé en matériel informatique et de ce que j’ai vu ils sont à peu près au même niveau de développement que nos projets en test. Sauf qu’ils sont déjà en pleine utilisation. J’imagine que le quartier général possède la pointe de ce qu’ils ont donc j’estime leur avance a six mois ou un an. Plus par rapport au mug Schoclacho. On s’est trouvé un endroit calme – les toilettes du deuxième étage – pour nous reposer et reprendre des forces. D’après les panneaux d’informations affichés à l’accueil, le bureau de Sam Moringal, le « PDG de la Terre », se trouve au dix-septième étage. J’aurais parié sur le douzième… J’hésite entre le soulagement que l’univers n’est pas de si mauvais goût que ça et le mauvais pressentiment quand on arrivera à l’étage douze…


Liz ferma son journal puis sauvegarda l’entièreté de celui-ci dans la base de données du mug T. Dans le compartiment secret qu’elle avait installé avec Gertrude au cas où elles devraient stocker des données vraiment confidentielles, puis elle se mit au travail pour déconnecter les montres des autres du réseau commun. Il était hors de question que l’un de ces terriens accède à leurs données et leurs systèmes de protection. Normalement, ils ne pourraient rien faire à partir de celles des autres mais la sienne était déjà une faille de sécurité énorme, donc elle allait faire ça proprement pendant que ses coéquipiers dormaient. Se connecter aux montres de Karen et de François était d’une simplicité enfantine. Elle verrouilla leur accès au réseau et supprima tous les mots-de-passe stockés dans le cache, puis fit de même avec celles des deux autres, ce qui était à peine plus compliqué même si elle ne connaissait pas leur système. A son retour, elle devrait vraiment indiquer aux informaticiens du mug Schoclacho qu’ils devaient revoir leur sécurité. Pour finir, elle se mit à nettoyer et à isoler sa propre montre. Toutes les données confidentielles qu’elle avait accumulées dessus, c’était incroyable ! Pourquoi en avait-elle eu le droit ?
– Tu ne dors pas ?
Elle appuya sur le dernier bouton d’approbation et leva les yeux vers son meilleur ami qui s’était tourné vers elle. Il la regardait de ses grands yeux bleus inquiets, ses cheveux longs complètement désordonnés après la nuit par terre. Elle pencha la tête avant de lui répondre.
– Tu ne fais pas ton jogging matinal ?
– Evidemment que non. Ah. Je vois. Tu fais quoi ?
– Je déconnecte les montres au cas où les ennemis les prendraient.
– Pourquoi ?
Il posait parfois des questions plutôt stupides. Tout système informatique pouvait se faire hacker par quelqu’un de doué et d’après ce qu’elle avait vu, ils avaient des personnes vraiment douées dans leur quartier général. C’était d’ailleurs étonnant qu’ils n’aient pas encore fait de tentative pour se connecter à leurs montres mais peut-être qu’ils n’étaient pas sur les lieux. Ou alors ils ne les prenaient pas assez au sérieux. Ils étaient quand même cinq personnes qui s’étaient enfermées dans des toilettes de QG.
– Parce que sinon ils peuvent par exemple éteindre le système de ventilation.
– On peut faire ça avec nos montres ?!
– Plus maintenant.
C’était vrai que François ne s’intéressait pas du tout à l’informatique. S’il pouvait jouer à des jeux vidéo, cela lui suffisait. Elle toucha sa montre et fut satisfaite de voir qu’elle ne lui affichait plus que leur position dans l’immeuble, la date, l’heure et les messages d’urgence – qui étaient désactivés en réalité.
– Je réveille les autres pour le petit-déjeuner, l’informa François. Je pense qu’on devrait se dépêcher d’agir avant qu’ils commencent à nous chercher.

Peu de temps après, le groupe était réveillé, rassasié et plein d’entrain pour commencer l’escalade de l’immeuble. Enfin tout le monde sauf elle-même évidemment. Elle avait toujours encore de la nausée et la perspective de devoir monter quatorze étages la fatiguait d’avance. Prenant son courage à deux mains, ce fut néanmoins elle qui déverrouilla la porte pendant qu’Amaniel se tenait prêt à électrocuter n’importe qui qui tenterait de s’introduire dans les toilettes. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’il n’y avait pas d’employés inoffensifs ici, n’est-ce pas ?
Karen prit les devants de l’opération après s’être enquise sur leur destination. Ils progressèrent sans être dérangés – c’était vraiment un immeuble de bureau avec de longs couloirs vides et des escaliers à peine moins remplis – jusqu’à ce qu’un panneau annonce le douzième étage. Evidemment le douzième étage. Cela ne pouvait pas être autrement. Un groupe de super-humains terriens leur faisait face, tenant des armes à feu dans les mains et les empêchant de passer.
– Je ne pense pas qu’ils veulent de la douane, fit François. On force le passage ?
Amaniel n’attendit pas la réponse pour se lancer à l’attaque. Très rapidement ce fut le bazar total. Liz se colla contre le mur et essaya de trouver une idée pour utiliser son super-pouvoir en combat. Elle ne pouvait pas déplacer les objets à distance ni rien faire d’utile. En fait elle ne pouvait rien faire du tout. Elle n’arrivait même pas à quitter son corps. Elle avait trop peur qu’il lui arrive quelque chose pendant son absence. Ça la bloquait complètement. Sans oublier qu’elle était déjà fatiguée à cause des escaliers… Elle ne comprenait vraiment pas d’où Karen prenait l’énergie de cracher du feu alors qu’elle avait soufflé et toussé à s’en arracher la gorge juste avant. Correction. C’était pour cela qu’elle pouvait cracher autant de feu. Devant elle, François avait désarmé un de leurs ennemis et les mitraillait avec leurs propres armes pour la protéger.
– Allez vous occuper du chef, cria Tizita. On s’amuse encore un peu avec ceux-là.
– Ouais, confirma Amaniel. Il n’y en a pas assez pour nous tous.
Les deux Schoclachoiens se battaient avec une ferveur qui semblait indiquer qu’ils s’étaient préparés pour ce moment durant de longues années. C’était franchement injuste. Enfin, elle n’allait pas râler non plus puisque c’était grâce à eux s’ils avaient la moindre chance de réussite. François appela Karen et les trois se précipitèrent sur les escaliers, les deux autres se mettant dans le chemin des ennemis qui voulaient les poursuivre. Ils se précipitèrent sur plusieurs étages, avant que Liz ne trébuche. Elle n’en pouvait plus mais les deux autres ne semblaient pas dans un meilleur état. Karen avait la respiration sifflante, des restes de flammes s’échappant de temps en temps de sa bouche. François profita de cette pause pour panser quelques plaies qu’elle n’avait même pas remarqué.
– Bon, on continue plus lentement, les encourageait le jeune homme. Je sais bien qu’on ne peut pas arriver devant ce PDG en étant complètement à sec mais on ne peut pas se permettre de rester plus longtemps ici que nécessaire.
Liz hocha doucement la tête. Elle avait mal partout. Ses muscles vibraient sous une tension qu’elle ne connaissait pas et elle essayait tant bien que mal de réprimer des haut-le-cœur. D’un seul coup, elle n’aurait plus le moindre problème de passer dans sa forme astrale. Même si ce n’était pas la meilleure des idées.
– Je peux jeter un coup d’œil sur ce qui nous attend, proposa-t-elle. Faut juste que vous surveilliez mon corps deux minutes.
Après un regard sur Karen pliée en deux, François acquiesça et Liz se concentra sur son souhait de quitter ce corps qui la faisait souffrir. Elle se sentit rapidement légère comme un nuage et elle lisait la surprise sur le visage de François quand elle se rendit invisible par sa simple volonté. Puis elle traversa le plafond. L’étage quinze était complètement vide mais l’étage seize contenait ce qu’elle supposait être la garde rapprochée du Super-Vilain : cinq terriens hauts de deux mètres cinquante avec des muscles plus larges qu’elle tout entière. C’était à ça que devait ressembler
– Je sens une présence, grogna l’un d’entre eux.
– N’importe quoi, aboya le chef de la garde. Ils ne pourront jamais passer à travers l’unité à l’étage douze. Tu devrais arrêter ta bière du soir.
Liz déglutit et retourna sans attendre dans son enveloppe charnelle. Si les gardes pouvaient ressentir sa présence alors qu’elle était invisible, cela ne servait à rien d’avertir le big boss de leur arrivée.
– Cinq au seize, souffla-t-elle dès qu’elle eut ouvert les yeux. Il y en a un qui a senti ma présence mais ils ne croient pas qu’on a pu dépasser leurs amis plus bas.
– Alors, on y va directement. Karen, il te reste du feu ? Liz, reste bien derrière moi.
Le haussement d’épaules que Karen lui répondit n’était pas vraiment mais ils n’avaient pas le choix. Ils devaient y aller avant de se retrouver coincer entre deux groupes d’hommes de main de leur ennemi imposé. Le cœur lourd, enfin surtout les jambes lourdes, ils grimpèrent les deux étages qui les séparaient du prochain combat.
D’entrée de jeu, François lâcha une rafale de coups de feu sur les cinq gardes mais ils n’étaient pas l’élite de la garde rapprochée pour rien. Ils s’y connaissaient en combats se jetèrent sur le jeune homme sans marquer la moindre hésitation face à leurs présences.
Karen essaya d’en cramer un ou deux mais la seule chose qu’elle réussit de cracher fut un filet de bave. Cela eut le mérite de tirer une grimace dégoûtée à son ennemi – ils avaient donc des émotions – mais ne le ralentit même pas. François se battit vaillamment mais il était désormais seul contre cinq et voulait protéger les deux femmes. C’était mal parti. Essayant de faire confiance à ses amis pour son corps, Liz se blottit contre le mur et essaya de se concentrer pour en sortir. Elle ne pouvait rien faire à cause de sa condition physique mais elle pouvait essayer de balancer des poings astraux sur les ennemis. D’accord, elle pensait la situation désespérée.
– Qu’est-ce que… ?
François ravala la fin de sa phrase quand son arme fit un clic sans tirer. Vide ! Liz le remarqua et pendant que son ami commença à l’utiliser comme un bâton ou une masse, elle saisit l’occasion. Elle fonça sur le garde du milieu, celui qui venait de baisser sa garde parce qu’il était protégé de tous les côtés et matérialisa sa main astrale juste avant de la lui coller contre la mâchoire.
– Aïe !
C’était que ça faisait mal de frapper quelqu’un ! N’était-elle pas censée sentir aucune la douleur parce qu’elle n’était qu’un esprit ? Enfin ce n’était pas le moment d’y penser. Profitant de la stupéfaction de son adversaire, elle lui arracha son arme et la ramena rapidement à François. Elle n’était pas sûre de savoir comment s’en servir et d’ailleurs il en avait bien besoin, les quatre autres s’acharnant sur lui. Pourquoi ils ne tiraient pas ? Elle eut la réponse à cette question quand François appuya sur la détente qu’elle venait de lui tendre. Ils étaient tous beaucoup trop proches !
L’onde de choc fit que Liz rouvrit les yeux dans son corps. C’était horrible, elle avait mal partout ! Que devaient ressentir Karen qui avait été plus proche ou surtout François qui avait été au centre de l’explosion ? Prise de la peur panique qu’ils soient morts, elle se précipita vers l’affrontement. Oui, d’accord, elle essaya et se ramassa après trois pas. C’est l’intention qui comptait. D’ailleurs, maintenant que la fumée se dissipait, elle pouvait très bien voir Karen poignarder les ennemis – d’où elle sortait un couteau et surtout suffisamment de sang-froid pour faire ça ? Cela voulait sans nul doute dire qu’ils n’étaient pas morts et que donc François avait une chance… Elle réussit à se remettre sur les genoux et se détourna pour vomir le maigre petit-déjeuner qu’elle avait réussi à avaler ce qui lui paraissait une éternité plus tôt. Comment Karen et François pouvaient tuer des personnes ? Même s’ils ne ressemblaient plus à des géants, c’était toujours encore des humains qui parlaient la même langue qu’eux, qui trouvaient la bave dégoûtante et qui buvaient de la bière. Elle aurait voulu se rouler en boule et oublier tout cela.
– Allez viens, Liz.
François ne lui demanda pas son avis avant de la soulever et de la placer sur ses pieds. A sa plus grande honte, Liz se relaissa tomber. Elle ne voulait plus. Si sauver des personnes signifiait devoir en tuer d’autres qui ne lui avaient rien fait, elle ne voulait pas être une super-héroïne. Même pour Karen.
– Tu aurais préféré qu’ils nous tuent nous ? La vieille ingénieure s’agenouilla à ses côtés. C’est horrible mais tu ne vas rien améliorer si tu restes ici à te laisser mourir. On va avoir besoin de toi en haut.
Liz aurait voulu rire noir mais elle était incapable de faire sortir le moindre bruit de sa bouche. Besoin d’elle ? C’était plus qu’improbable. Elle ne servait à rien. Elle ne servait jamais à quoique ce soit. Et ses seuls amis étaient des meurtriers. Ils n’étaient pas des super-héros. Ils n’étaient probablement même pas mieux que celui qui leur avait été désigné comme super-vilain. Qu’est-ce qu’ils savaient de lui d’ailleurs ?
– On n’aurait pas dû la laisser venir, déclara François. Tu n’aurais pas dû lui faire faire une promesse aussi ridicule. Tu savais qu’elle voudrait la tenir à tout prix. Et voilà où ça nous a mené. Tu es contente de toi, Karen ?
– Eh, je n’ai jamais voulu ça, intervint la cracheuse de feu. Allez, viens. Je sais ce qu’il faut. Des preuves qu’ils sont méchants et nous les bons.
– Tu as raison, pardon. Regardons les dossiers là-bas.
Liz pressa les mains sur les yeux mais les corps des gardes du corps qui ne reposaient pas plus loin que quelques mètres lui donnaient envie de vomir. Malheureusement elle avait déjà tout fait sortir alors elle restait prostrée là à écouter les théories de ses amis qui essayaient de trouver des informations.
– Regarde ça.
– C’est horrible. On ne peut pas lui montrer ça maintenant.
– En effet.
– Mais on fait quoi ?
– Le tableau-là avec les chiffres et les noms. Laisse les photos ici.
– Regarde, Liz. On fait des choses pas bonnes mais c’est pour une bonne cause. Regarde ce qu’eux font subir à des innocents sans défense.
Elle ouvrit les yeux en sentant du papier contre sa main. Ils avaient encore des données stockées sur du papier ?! Intéressant… Oui, les informations, c’était toujours important. Peu importe de qui sur qui et apportées par qui. Peut-être qu’elles n’étaient pas fiables mais ils étaient quand même dans le quartier général dans l’étage juste en dessous du chef. Il y avait des chances que ce soit vrai.
– Une liste de personnes, identifia-t-elle.
– Oui, avec date d’internement et date de mort, précisa François en grimaçant. Tu viens maintenant ?
Liz avait beau savoir qu’ils ne lui avaient donné probablement le pire des papiers mais elle trouvait cela encore plus horrible que de tuer des personnes armées et étant conscients qu’elles faisaient un travail risqué. Elle hocha la tête et François l’aida à se lever.

Le dix-septième étage n’était pas un étage. C’était le toit. Pourquoi n’y avaient-ils pas atterri directement ? Ils auraient évité les escaliers... Au milieu de ce toit de luxe – il y avait même une piscine – se tenait Sam Moringal, le PDG du monde et le super-vilain qu’ils devaient combattre parce qu’on le leur avait demandé. Il n’était pas bien grand et même pas terrifiant. Sa barbe de trois jours grisonnait. Son costume bleu et ses cernes creusées lui donnaient un air de manager surchargé. Il avait même un ordinateur portable coincé entre un bras et une auréole de sueur. En gros, il ne ressemblait pas du tout à l’image que Liz s’était faite de lui. Conséquence logique, elle se méfiait énormément.
A côté d’elle, puisqu’elle était toujours appuyée sur lui, François semblait se détendre. Elle avait envie de lui marcher sur le pied pour le réveiller mais c’était probablement une mauvaise idée. On n’affaiblissait pas sa propre équipe avant un combat. A peine à un mètre d’eux, Karen se tenait les côtes comme si elle avait couru un marathon, ce qui aurait probablement demandé moins de condition physique que l’escalade des escaliers. Si on ajoutait qu’elle-même ne tenait debout que grâce au bras de son ami et que celui-ci venait d’affronter une dizaine des soldats de ce Sam Moringal… Le bilan n’était pas très positif pour eux. Même face à un manager en burn-out. Et surtout face au PDG de la planète.
C’était foutu, ils ne pourraient pas le vaincre. Karen n’avait plus de souffle, François était fatigué et elle n’avait toujours encore pas découvert comment utiliser son voyage astral de manière utile en combat. Comment dépeindre une situation plus désespérée ? C’était difficile. Dans un film, ce serait le moment où le super-héros arriverait en volant pour protéger les pauvres civils qui criaient à l’aide et lutterait contre le méchant en tenue de cuir. Décidément, ce n’était pas un film. Sam-Vilain ne portait que des chaussures en cuir – et peut-être une ceinture mais elle ne pouvait pas la voir. Accessoirement, il n’y avait aussi pas de civils en vue – normal sur le toit d’un immeuble – ni de super-héros volant – c’était censé être son rôle d’après Karen !
Alors oui, Liz était convaincue qu’elle n’avait plus beaucoup de temps à vivre. Enfin encore moins que précédemment puisqu’on ne pouvait pas dire que l’espérance de vie d’un être humain soit particulièrement élevée si on ramenait cela à l’âge de l’univers, de la Terre ou même à celle d’une histoire. Pourquoi elle ne pouvait pas s’arrêter de penser des trucs sans importances ? Était-ce parce que son cerveau refusait la possibilité de mourir ? Et là elle avait l’envie pressante de parler – chose qui ne lui était encore jamais arrivée. Elle voulait partager ses pensées et en discuter. Alors qu’elles étaient complètement incohérentes vis-à-vis de la situation et inutiles au plus haut point. Tant pis.
– Vous saviez que les moutons Ile-de-France ont été élevés pour produire et de la viande et de la laine. Par contre, à chaque tonte, on n’obtient qu’environ cinq kilo alors que ça peut atteindre cent kilo pour un mouton…
– Ne me dites pas que mes actions dans les pulls de laine mérinos-alpaca ont chuté ! s’exclama le chef de toute la planète. Ils ne pouvaient pas me faire cela ! C’est un geste divin qui veut détruire mes plans diaboliques !
Qu’est-ce que des pulls en laine super-douce pouvaient avoir à faire dans des plans diaboliques ? Elle ne le savait pas. Et honnêtement elle n’était pas en état d’y réfléchir plus que ça. C’était une faille de son adversaire et elle ne devait pas penser au fait qu’elle devrait peut-être tuer quelqu’un. Il était cruel, il était méchant. C’était le pire manager et PDG du monde puisqu’il torturait et tuait des personnes innocentes. C’était son devoir de super-héroïne de l’en empêcher.
– Elles ont été dépassées par celles dans les pulls en polyester, affirma-t-elle sans sourciller.
– Catastrophe ! fit Sam-Vilain. Je vais vous tuer parce que vous avez eu l’imprudence de me l’annoncer sans amener de boîte de chocolats.
Il y avait des raisonnements qui lui échappaient sur Terre. Elle n’eut pas plus de temps pour s’y attarder car il se déplaçait vraiment rapidement pour un manager en burn-out. Karen fut balancée au loin par un coup de poing dans le ventre qu’elle n’avait même pas eu le temps de voir venir. Puis Sam-Vilain était déjà auprès d’eux et François paraît les coups avec autant de dextérité qu’il était possible avec une main en soutenant une autre personne, c’est-à-dire quasiment aucune. Au moment où un coup de pied particulièrement puissant le faucha de ses jambes, il poussa Liz hors d’atteinte de leur ennemi qui s’arrêta un instant avec le tournis suite à sa dernière attaque. La jeune femme était sûre que dans quelques instants il serait sur elle pour lui faire regretter ses paroles.
Ce fut à ce moment que les nuages se déchirèrent et qu’une énorme boule blanche fondit l’air pour atterrir sur Sam-Vilain. Elle attendit un moment et Liz eut du mal à croire ses yeux jusqu’à ce que la boule se releva, se secoua et prit la parole.
– Bonjour la compagnie ! Je suis Super-Moumoute ! Vous avez besoin d’aide ?
Un mouton volant. Pire un mouton super-héros. Liz devait d’abord digérer qu’elle venait de se faire sauver par un mouton. Ça, c’était sûr, c’était un très mauvais film.
– Merci, balbutia-t-elle. Tu viens de nous sauver…
– Ne me remercie pas, c’est le travail de Super-Moumoute !
Si un mouton pouvait sourire de pleine dent et montrer son pouce d’un geste qui se voulait classe, il l’aurait fait. Heureusement que les moutons avaient des sabots…

Note de fin de chapitre:

Alors ? La chute vous a déçu ? (non, ce n'était pas le but, j'aimais l'idée d'un super-héros-mouton qui sauve les super-héros en détresse). Un commentaire ?
Merci d'avoir lu !

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