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J’ai couché un mot

Sur la page blanche

Qui ne l’était plus


J’ai couché ce mot

Pour que ses lettres penchent

Et son sens se dilue


J’ai arraché ce mot

Aux années de silence

À mes lèvres closes


J’ai vomi ce mot

Avec tant de violence

J’ai dégueulé ma prose


J’ai sorti ce mot

Et mes tripes sur le papier

J’ai pleuré des litres d’encre


J’avais couché un mot

Qui en a entraîné d’autres dans le cahier

Que j’ai imbibé d’encre


J’ai laissé déborder les mots

J’en ai fait des histoires

J’en ai fait des poèmes


J’ai déversé mes maux

Mes angoisses, mes regrets, mes espoirs

J’ai écrit à m’en rendre blême


J’ai vidé mon cœur

Rempli les marges

Saturé les interlignes

Recouvert les pages

Gorgé les carnets

Garni les étagères

Racheté des étagères

Noyé les éditeurs

Inondé la toile

Comblé mon vide

Abreuvé peut-être des lecteurs


Puis j’ai arrêté d’écrire

Quand j’ai eu tout raconté


J’ai contemplé ces mots

Qui m’avaient rendu des couleurs

Que j’avais oubliées


J’avais couché des mots

Pour apaiser la douleur

Elle était apaisée
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